Des propos réactionnaires sur la famille
Emmanuel Macron propose “un devoir de visite, un devoir d’accompagnement jusqu’à l’âge adulte”, en enchainant des propos lunaires : “Je suis sûr qu’il faut un père, une mère”, “Un enfant qui ne voit jamais son père, c’est un enfant qui se sent abandonné. C’est un enfant dont le développement affectif, éducatif, n’est pas le même.”
En affirmant ce genre de chose, le président exclut tout simplement les modèles familiaux LGBTQIA+ : les familles composées de deux pères, ou de deux mères, par exemple. Par la même occasion, il affirme qu’une famille constituée d’une mère célibataire serait incomplète, et mauvaise pour le développement de l’enfant.
La réalité des familles monoparentales
83% des familles monoparentales sont portées par une femme. De plus, comme Salomé Saqué le souligne très justement, “la part des pères à la tête de familles monoparentales diminue avec le nombre d’enfants.” Alors oui, on constate ici une forte inégalité de genre.
Seulement, le (très) gros problème avec ce que propose Emmanuel Macron, c’est que dans la majorité des cas, c’est le père qui choisit de partir. Et ce, contrairement à ce que prétendent certaines associations telles que “SOS Papa” : on sait grâce à une étude de 2013 que “dans 82% des affaires impliquant des parents ayant des enfants à charge (…), il n’y a pas de conflit sur la résidence des enfants”.
Autre soucis : l’environnement familial, dans de nombreux cas, peut se révéler violent et dangereux pour l’enfant. On estime par exemple qu’en 2020, 6,7 millions de personnes ont déclarés avoir été victimes d’inceste au cours de leur vie, et que 160 000 enfants sont victimes d’inceste chaque année.
Par ailleurs, le nombre de femmes victimes de violences conjugales (violences sexuelles, physiques ou psychologiques) chaque année est estimé à 321 000, d’après l’observatoire national des violences faites aux femmes. A-t-on vraiment envie de forcer le père à voir son enfant, dans des cas comme ceux-là ?
Soutenir les familles monoparentales, et ne plus voir ce modèle familial comme anormal
Nous vivons dans une société où les familles monoparentales (souvent portées par la mère, donc) sont particulièrement précaires (taux de chômage élevé, temps partiels, niveau de vie inférieur de 30% à celui des couples avec enfants). Et c’est là, tout simplement, que devrait se situer la priorité absolue.
C’est d’ailleurs précisément ce que préconise un rapport du Sénat publié en mars 2024 : lutter contre la précarisation des familles monoparentales, en renforçant la solidarité à leur égard, et en priorisant l’accès aux droits et services pour ces familles.
Et surtout, un travail de fond, afin que ce modèle de famille soit reconnu comme étant acceptable, et ne soit plus perçu comme une anomalie. Car c’est justement ce que sous-entend Emmanuel Macron en évoquant un “devoir de visite” : vouloir “réparer” les familles “cassées”.