Des eaux souterraines à l’agonie : 300 polluants détectés

Enquête après enquête, le constat est accablant : les eaux souterraines françaises sont littéralement empoisonnées. Une grande enquête menée par Le Monde et six autres médias européens dévoile l’ampleur du désastre écologique.

Sur près de 24 700 stations de contrôle en France, plus de 6 900 ont enregistré au moins un dépassement de leurs valeurs seuils entre 2016 et 2023. Autrement dit, plus d’un quart des stations. En tout, 300 polluants différents souillent nos nappes phréatiques.

Les Pesticides : Principaux Coupables

Sans surprise, la première source de cette contamination est imputée aux pesticides et à leurs sous-produits, les métabolites. Ces substances toxiques sont présentes dans 97 % des stations de contrôle. Pire encore, dans près de 20 % des cas, les normes de sécurité sont largement dépassées. Comme le souligne l’enquête, “la carte de la pollution aux pesticides se superpose à celle des zones où les traitements phytosanitaires sont les plus fréquents”.

Ces produits chimiques ne se contentent pas de s’infiltrer dans nos sous-sols, ils y persistent pendant des décennies. Par exemple, en Martinique et en Guadeloupe, le chlordécone, utilisé jusque dans les années 90 dans les plantations de bananes, continue de dépasser les seuils de sécurité aujourd’hui. En France métropolitaine, l’atrazine, un herbicide banni depuis 2003, et ses métabolites excèdent 1 microgramme par litre dans 7 % des points de contrôle. Quant à la chloridazone, un herbicide autorisé jusqu’en 2020, ses métabolites dépassent les normes dans 18 % des stations de contrôle.

Les pesticides ne sont pas les seuls en cause. Des polluants d’origine industrielle, tout aussi nocifs, sont également présents dans nos nappes phréatiques. Ces substances chimiques, déversées pendant des décennies, continuent de contaminer notre environnement à un niveau alarmant.

Une Biodiversité en Péril

Les eaux souterraines ne sont pas isolées. Elles alimentent les cours d’eau et les sources, où une biodiversité riche est présente. Le Monde rappelle que “quand les zones sont trop dégradées, les captages destinés à la consommation humaine sont abandonnés”. À ce jour, 13 000 captages d’eau potable ont été fermés, dont un tiers en raison de la mauvaise qualité des eaux.

En mars dernier, Reporterre révélait que 16 % des captages d’eau en France ne bénéficient pas de périmètre de protection, exposant ainsi davantage notre eau à la contamination. L’objectif européen était de restaurer un bon état des eaux souterraines d’ici 2015. Hélas, cet objectif a été repoussé à 2027. La Cour des comptes, dans son rapport de juillet 2023, notait qu’il reste “encore beaucoup à faire pour atteindre le bon état des masses d’eau” et que cet objectif semble hors de portée.

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