Tout a commencé avec le projet de loi de finances 2024 proposé par le président William Ruto. Il promet une hausse monstrueuse des prix de tout, du pain aux œufs, en passant par l’essence et les produits d’hygiène essentiels. En gros, tout ce dont les Kenyans ont besoin pour survivre au quotidien.
Dans un pays où l’économie est déjà en miettes, où la majorité des travailleurs sont des ” auto-entrepreneurs ” forcés, ce projet de loi est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Ces travailleurs, qu’on appelle pompeusement des ” entrepreneurs “, sont en réalité des esclaves de grosses boîtes technologiques ou des agences de l’État. Et là, on leur balance en pleine gueule une nouvelle série de taxes qui va les étouffer encore plus.
Alors forcément, ils ont pété les plombs. Et dès les premières heures, ça a chauffé. Des affrontements ont éclaté entre les manifestants et les flics devant le Parlement national. Mais attention, ce mouvement n’a rien d’une petite jacquerie ” petit-bourgeoise ” que les médias aiment nous vendre, Non, c’est une révolution spontanée et populaire!
Comme toujours, les médias et les politicards se sont empressés de coller des étiquettes sur ce soulèvement. Ils parlent de lutte contre la corruption, de protestation contre des taxes injustes, ou encore d’une demande pour plus de démocratie. Mais tout ça, c’est des conneries. La réalité, c’est que les prolétaires ont décidé de se lever contre un système qui les exploite sans relâche. Ils pillent, saccagent, s’attaquent aux symboles de l’État bourgeois en refusant toutes tentatives de récupération!
Il faut bien comprendre que cette situation explosive n’est pas née du jour au lendemain. Depuis des mois, le Kenya est secoué par des manifestations, des émeutes, des grèves. Déjà en 2023, un projet de loi similaire avait provoqué plusieurs jours de chaos à Nairobi, avec des routes et des gares ferroviaires endommagées. Les coupures d’eau et d’électricité ont aussi mis le feu aux poudres, tout comme la grève prolongée des travailleurs de la santé.
Mais cette fois, c’est différent. Cette fois, personne ne se cache derrière des figures politiques de la pseudo opposition pour tenter de récupérer le mouvement. Non, les manifestants se sont auto-organisés, sans leader pour les trahir. Les travailleurs savent très bien qui est leur ennemi, et ils n’ont pas besoin qu’on leur dise où frapper. Ils le font, point barre.
De Nairobi, le mouvement s’est propagé à vitesse grand V. Kisumu, Eldoret, Mombasa, Lamu, et même de petites villes ont rejoint la danse. Les flics, en bon chiens de garde du système, ont répondu avec leur brutalité habituelle : des dizaines de manifestants ont été tués, des centaines blessés, et beaucoup sont portés disparus. Mais au lieu d’éteindre les flammes de la révolte, cette répression n’a fait que les attiser Quand les flics ont, par exemple, tenté de briser les barricades sur l’autoroute reliant Nairobi à Mombasa, en tirant à balles réelles, les jeunes des bidonvilles voisins se ont rejoints la bataille. Ils n’avaient rien à perdre, alors ils ont pris des pierres, des bâtons, et tout ce qui leur tombait sous la main, pour défendre leur droit à une vie digne.
Le 25 juin, les manifestants ont franchi une nouvelle étape en prenant d’assaut le Parlement national. Ils l’ont saccagé, partiellement incendié, envoyant un message clair à Ruto et à toute la classe dirigeante. En réponse, Ruto a déployé l’armée dans les rues et restreint l’accès à Internet. Mais ces mesures répressives n’ont, une nouvelle fois, eu aucun effet. Les manifestants sont restés debout, déterminés à faire tomber ce système pourri.
Face a la répression, les manifestants ont commencé à ” doxer ” les flics violents, c’est-à-dire à publier leurs informations personnelles en ligne – adresses, numéros de téléphone, photos – pour qu’ils se retrouvent exposés à la justice populaire. Et certains de ces flics ont déjà goûté à cette justice. Pendant ce temps, la violence d’État ne fait qu’empirer, avec la découverte de charniers de femmes assassinées près de Nairobi. Mais au lieu de se décourager, les manifestants sont plus déterminés que jamais.
Dans les rangs de la police et de l’armée, des fissures commencent à apparaître. Certains flics et soldats, écoeurés par la répression, ont rejoint les manifestants. C’est encore rare, mais ça montre bien que même au sein de l’appareil répressif, tout le monde n’est pas prêt à se salir les mains pour défendre un régime qui écrase les plus pauvres.
Les tentatives de Ruto pour calmer la situation se sont toutes soldées par un échec. La suppression temporaire du projet de loi n’a pas apaisé la colère des manifestants. Le limogeage du chef de la police, Japhet Koome, n’a rien changé non plus. La dernière tentative en date, c’est la création d’un ” Forum national multisectoriel pour le dialogue “. Autrement dit, une tentative désespérée de transformer la lutte des classes en un gentil débat civilisé. Mais les manifestants ne sont pas dupes. Ils savent que ce genre de manœuvre vise à étouffer leur colère et à les ramener dans le rang. Et ils ne comptent pas se laisser faire.
Le mouvement kényan n’est pas seulement un soulèvement local. Il a aussi inspiré des révoltes ailleurs en Afrique, notamment en Ouganda et au Nigeria, où les travailleurs se battent contre les mêmes ennemis : la pauvreté, la répression, et un système capitaliste qui les broie sans pitié. La lutte continue, et ce n’est que le début!