Le bouclier tarifaire : un écran de fumée pour protéger les intérêts privés au détriment des travailleurs

En guise de parade à une crise énergétique qui a mis à genoux les ménages français, le gouvernement a déployé son soi-disant bouclier tarifaire, prétendant offrir un rempart contre la tempête des prix flambants. Toutefois, selon un rapport accablant de la Cour des comptes, ce dispositif se révèle être moins un bouclier pour les citoyens qu’un festin pour les vautours du marché de l’énergie, illustrant avec une précision chirurgicale le gaspillage grotesque de l’argent public.

La genèse d’une imposture

Sous la pression de la Commission européenne, qui en 2022 a finalement haussé le ton face à l’avidité sans bornes des fournisseurs d’énergie, le ministre des finances français, jusqu’alors aveugle aux superprofits, a été contraint d’improviser une taxe – la fameuse “contribution sur la rente inframarginale”. Promise pour rapporter des milliards, cette taxe a piteusement échoué, engrangeant à peine de quoi payer le champagne lors des réunions ministérielles, loin des 8,8 milliards d’euros escomptés.

Des révisions à la baisse, un aveu d’échec

D’abord optimiste, Bercy a dû rapidement déchanter, ajustant ses prévisions de recettes fiscales de manière aussi fréquente que ses dirigeants changent de cravates. De 8,8 milliards prévus, on est tombé à un pathétique 600 millions d’euros. Cette déroute prévisionnelle n’est pas juste une erreur de calcul; elle est symptomatique d’une administration déconnectée des réalités du marché et de ses propres politiques.

Un festin pour les profiteurs

Loin d’être un rempart pour les consommateurs, le bouclier tarifaire a été une aubaine pour les magnats de l’énergie. La Cour des comptes dépeint un tableau où 30 milliards d’euros de surprofits se sont tranquillement répartis parmi les acteurs du secteur, pendant que les ménages continuaient de voir leurs factures grimper. Un écart flagrant et scandaleux entre les bénéfices privés et les recettes publiques.

La complicité gouvernementale dans le fiasco

Interrogé sur ces aberrations, le ministère des finances, tel un enfant pris en faute, n’a offert aucune explication convaincante. La Cour des comptes ne mâche pas ses mots, suggérant que les décisions politiques ont délibérément favorisé une faible imposition des superprofits, sacrifiant les intérêts publics sur l’autel de la complaisance envers les élites économiques.

Un marché dérégulé et déréglé

Le rapport expose sans détour les conséquences désastreuses d’une politique énergétique française en lambeaux, où le marché de l’électricité, déjà critiqué pour ses dysfonctionnements, a implosé sous la pression de la crise. Des économistes avaient sonné l’alarme bien avant l’escalade des prix; leurs avertissements, ignorés, ont trouvé une résonance retentissante dans la réalité de 2021, lorsque tout a volé en éclats.

Des mesures d’urgence, une urgence de mesures

Le gouvernement, dans un élan de panique plutôt que de planification, a lancé des mesures d’urgence. Ces décisions, improvisées et incohérentes, ont non seulement révélé une incapacité à anticiper ou à gérer efficacement la crise, mais ont également mis en lumière l’incapacité chronique à innover en politique publique. Le gel des tarifs, les chèques énergie et autres pansements appliqués à la hâte ont peu fait pour endiguer une hémorragie financière et sociale.

L’aveuglement volontaire et ses conséquences

Ce qui frappe dans ce fiasco, c’est la persistance du gouvernement à ignorer les solutions qui auraient pu atténuer la crise. Plutôt que de réguler ou de plafonner les prix de manière efficace, ou d’adopter des mesures fiscales ciblées qui auraient pu distribuer les charges de manière plus équitable, le pouvoir en place a choisi de se reposer sur un marché défaillant. Ce choix a non seulement exacerbé la crise, mais a également fait des consommateurs français les victimes expiatoires d’une politique économique désastreuse.

Une distribution aveugle et coûteuse

Le rapport souligne également que les aides ont été distribuées de manière presque indiscriminée, sans cibler les ménages et les entreprises les plus en besoin. Cela a non seulement dilapidé des ressources précieuses mais a aussi échoué à protéger ceux qui étaient les plus vulnérables aux chocs des prix de l’énergie. De plus, des sommes colossales ont été allouées à des secteurs déjà florissants, soulignant une fois de plus la tendance du gouvernement à favoriser les intérêts des puissants au détriment du bien commun.

Un manque de transparence et de redevabilité

L’absence de suivi et de contrôle sur l’utilisation des fonds alloués est un autre point noir de cette gestion de crise. Les entreprises bénéficiant de subventions publiques n’ont pas été tenues de rendre des comptes sur la manière dont ces fonds étaient utilisés, permettant ainsi une dérive des aides loin de leur objectif initial. Cela a non seulement permis à certaines entreprises de profiter indûment de subventions généreuses, mais a aussi privé l’État de ressources essentielles qui auraient pu être utilisées pour soutenir directement les consommateurs.

Le bilan catastrophique

En fin de compte, le bilan de cette politique est catastrophique : un système électrique privé de toute stratégie gouvernementale cohérente, une destruction de la compétitivité industrielle par des coûts énergétiques exorbitants, et une dépendance accrue aux caprices d’un marché incontrôlable. Le bouclier tarifaire, vendu comme une mesure de protection pour les travailleurs, s’est transformé en une subvention massive pour les acteurs de l’industrie énergétique.

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