Le RN s’offre Barnier sur un plateau : quand l’extrême droite tire les ficelles du gouvernement

Le Rassemblement National n’a pas perdu de temps pour faire savoir ce qu’il pense du gouvernement Barnier. Avant même l’installation officielle, le ton était déjà donné : ” Vous reprendrez bien un peu de ce plat avarié ? ” a lancé Sébastien Chenu sur les réseaux sociaux.

L’odeur de la décomposition se fait sentir, et pour cause : ce gouvernement, patchwork d’anciens LR et de rescapés de la Macronie, n’a rien d’une cuisine de grand chef. Il ressemble plutôt à un ragoût indigeste mijoté à la va-vite pour satisfaire un appétit électoral vorace.

Avec ses 126 députés, Marine Le Pen a le pouvoir de faire sauter Barnier d’un claquement de doigts, en s’associant à une motion de censure avec la gauche. Mais pourquoi se priver de ce jouet qu’est devenu le Premier ministre, lui qui doit désormais danser au rythme des exigences du RN ? La stratégie est simple : on garde Barnier en place tant qu’il joue le rôle de marionnette utile pour pousser les idées de l’extrême droite. C’est du donnant-donnant, et Barnier est prêt à tout pour rester en place, même à se laisser humilier par la cheffe frontiste.

Depuis sa nomination le 5 septembre, le RN a fait semblant de laisser le Premier ministre respirer. Pas question de fixer des ” lignes rouges ” trop tôt : ça aurait gâché le spectacle. Barnier sait qu’il doit éviter de faire entrer dans son gouvernement les têtes qui déplaisent au RN – exit donc Bertrand, Dupond-Moretti ou Darmanin. À la place, on lui impose un cahier des charges : pas de hausse d’impôts, taper dur sur l’immigration et la sécurité, et surtout, faire profil bas pour ne pas se prendre une censure en plein Hémicycle.

Le RN, qui se frotte les mains, parie même que Barnier ne tiendra pas jusqu’au vote du budget 2025. Ils promettent déjà un ” 49.3 ” suivi d’une censure bien sentie si le Premier ministre ne se plie pas assez à leurs caprices. En attendant, Marine Le Pen profite de chaque occasion pour pousser ses pions. Elle veut que Barnier légitime son discours sur l’immigration, la sécurité, et bien sûr, le grand nettoyage des institutions qu’elle fantasme. Le but ? Capitaliser sur chaque reculade du gouvernement pour montrer aux électeurs que le RN tire vraiment les ficelles.

Quand Barnier parle d’unité nationale, Le Pen voit surtout une opportunité de gagner sur tous les tableaux. Plus il cède, plus elle gagne en crédibilité auprès de son électorat. Elle est là, à se lécher les babines, attendant que Barnier se mette à genoux devant ses exigences. ” On va essayer d’en tirer un maximum sur les questions d’immigration et de sécurité “, résume sans détour Matthias Renault, député RN. En clair, chaque concession du gouvernement devient une victoire pour Le Pen, qui se fiche bien de voir Barnier couler tant qu’elle peut avancer ses pions idéologiques.

Le RN sait très bien comment jouer ce jeu. Tant que le gouvernement continuera à faire des concessions sur des points essentiels comme la baisse de la TVA sur l’énergie ou la réforme de l’aide médicale d’État, les frontistes feront mine de coopérer. Mais ce n’est qu’une façade. Le but ultime est de pousser Barnier à bout, de lui faire perdre toute crédibilité, et de prouver que même un gouvernement qui se dit ” de rassemblement ” doit finalement se plier à leur volonté.

L’arrogance du RN est telle qu’ils se permettent de fanfaronner sur leur mainmise. Philippe Olivier, conseiller de Marine Le Pen, l’avoue sans complexe : ” Tant qu’on obtiendra des choses, et que la gauche accusera le gouvernement d’être “dans les mains de Le Pen”, on sera les grands gagnants de la séquence. ” En gros, le RN est prêt à tout pour que le gouvernement paraisse le plus aligné possible sur leurs idées nauséabondes. C’est un jeu de dupes, où Barnier est piégé et où Le Pen se prépare à ramasser les miettes.

Et si certains doutent encore de l’opportunisme du RN, il suffit de se rappeler leur volte-face lors de la loi immigration en décembre 2023. Après des mois à la descendre en flèche, ils ont fini par voter le texte, se félicitant d’avoir fait passer une forme de ” préférence nationale “, leur vieille marotte xénophobe. Un coup politique orchestré par Le Pen, qui a su faire de cette loi un instrument de sa propagande. Le RN n’en est pas à une contradiction près : critiquer à tout va puis revendiquer la victoire, voilà leur méthode.

Ce coup de maître montre que Marine Le Pen sait parfaitement tirer les ficelles, même d’un texte qui ne colle pas exactement à ses idéaux. Tant que le résultat est là et que le récit médiatique est favorable, elle fonce. Et Barnier, coincé, regarde les dominos tomber sans pouvoir y faire grand-chose. À chaque reculade, c’est une victoire pour le RN, qui montre qu’il peut manipuler un gouvernement à sa guise.

Le RN a tout à gagner à ce jeu-là. Ils accusent le coup quand ça les arrange, puis se positionnent en sauveurs des ” vrais Français ” quand ils le veulent. Tout est question d’image, et pour l’instant, Barnier n’est qu’un pion dans leur stratégie de conquête. Leur objectif est simple : prouver qu’ils sont déjà au pouvoir sans y être. Et avec Barnier, ils ont trouvé le parfait faire-valoir pour leur plan.

Alors, pendant que Barnier tente de garder la tête hors de l’eau, Marine Le Pen continue de tisser sa toile. Elle sait qu’elle a tout à gagner à cette mascarade : un gouvernement qui se plie à ses exigences, un Premier ministre affaibli, et une gauche divisée. Le RN n’a plus qu’à attendre que la situation se détériore encore, pour pouvoir enfin revendiquer la place de ceux qui ” disent la vérité ” et ” agissent pour le peuple “. En attendant, c’est Barnier qui fait le sale boulot, et Le Pen qui en récolte les fruits.

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