Depuis l’annonce officielle des investitures aux législatives des 30 juin et 7 juillet, les exemples de dérapages racistes s’accumulent. Le RN a beau affirmer qu’il a changé, qu’il a écarté ses éléments les plus radicaux et qu’il se prépare depuis des années à accéder au pouvoir, la réalité est tout autre. Comme à chaque scrutin, des candidat·es échappent aux consignes de discrétion et de modération, laissant entrevoir le fond de leur pensée.
L’ampleur du phénomène est d’autant plus significative que le RN se montre particulièrement vigilant sur le sujet, pour des enjeux d’image. Lors des législatives de 2017, le parti avait déjà réalisé de manière officieuse des fiches sur ses candidat·es en amont des investitures officielles. Malgré cela, alors même que le RN a continué à se professionnaliser et que des candidats putatifs ont nettoyé leurs profils, il n’a fallu que quelques jours pour que des journalistes repèrent des dizaines de publications ouvertement racistes et antisémites.
Des propos qui font froid dans le dos
En deux salves, le quotidien Libération a mis en évidence les propos de 20 candidat·es, parmi lesquels Joseph Martin. Ce candidat investi dans le Morbihan – qui réfute tout antisémitisme – a notamment posté le message suivant, en octobre 2018 : » Le gaz a rendu justice aux victimes de la Shoah. » Jordan Bardella lui a finalement retiré son soutien.
Le président du parti n’a en revanche toujours pas réagi aux propos de sa candidate Agnès Pageard, investie à Paris. En janvier 2022, cette représentante du RN faisait part de son » coup de gueule » : » On nous bassine avec Momo qui ne veut pas livrer de kebab casher. Mais que nos “élites” sodomisent leurs propres enfants c’est beaucoup plus grave. Momo n’a pas de pouvoir, les Lang, Attali, Finkelkraut, Duhamel, Kouchner, Fabius, Guigou, Cohn-Bendit, BHL… oui. «
Le site StreetPress a également mis en lumière les propos publics du candidat Louis-Joseph Pecher, fils d’un historique du Front national investi par Jordan Bardella et Éric Ciotti en Meurthe-et-Moselle. Le président du parti Les Républicains (LR) lui a retiré son soutien après que son candidat a confirmé » être le propriétaire d’un compte X-Twitter » anonyme diffusant des messages racistes, sexistes et homophobes.
Une pratique généralisée
Mediapart a identifié vingt-quatre candidat·es RN supplémentaires ayant tenu des propos racistes, agissant tous sous leur vrai nom. Le parti d’extrême droite se défend régulièrement en expliquant ne pas pouvoir vérifier en un laps de temps réduit les profils détaillés de toutes celles et ceux qu’il investit. Notre enquête démontre que cet argument est caduc : certains des candidats que nous avons identifiés ont déjà des mandats électifs et des responsabilités au sein du parti.
C’est notamment le cas du conseiller régional René Lioret, patron du RN en Côte-d’Or. Cet ancien cadre d’un laboratoire pharmaceutique déclarait, par exemple, en réaction à la diffusion d’images d’un passage à tabac d’un jeune handicapé par d’autres adolescents, en octobre 2022 : » Les racailles africaines, c’est toujours à 3 ou 4 contre 1. C’est à ça qu’on les reconnaît ! «
En juin 2023, l’élu réagissait à un post sur le prétendu massacre d’un chameau en Afrique avec cet autre message : » Aucun doute n’est possible ! Nous avons bien à faire à des barbares. Si l’UE [Union européenne – ndlr] compte sur “Ça” pour repeupler le Vieux continent… «
Tony Bihouée, candidat RN dans le Finistère, s’est également illustré par ses commentaires ignobles après la mort de Nahel, tué par la police en juin 2023 à Nanterre : » Un gamin ? Une raclure ! Une racaille ! Un refus d’obtempérer alors faut pas chialer [émoji bisous]. «
Des candidats à l’idéologie douteuse
Parmi les autres perles, on trouve Christian Pérez, délégué départemental adjoint dans le Finistère, qui s’interroge sur la guerre en Ukraine : » Le seul but à atteindre est une négociation pour stopper ce conflit entre frères européens, pendant que l’Afrique vient se faire loger, soigner et nourrir en France… » Sans oublier ceux qui relaient des publications du mouvement royaliste de l’Action française (AF), comme Gaëtan Brault dans les Yvelines, et Jean-Marie Mourey, suppléant dans l’Ain.